Défaut dans l'oeil !

Publié le par nivelles

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La paille et la poutre… Matthieu 7 :1-5.

Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l’œil de ton frère et ne remarques-tu pas la poutre qui est dans ton œil ?

Cette histoire de paille et de poutre est des plus connues ! C’est devenu un proverbe populaire dont on a parfois oublié l’origine évangélique. Qui ne l’a jamais rappelé de manière qui lui semblait bien appropriée, c’est-à-dire à l’intention des autres ? Alors que justement cette comparaison rappelle que celui qui a la poutre dans l’œil, c’est moi et celui qui a la paille, c’est l’autre.

Quand j’entends cette interpellation, je m’interroge : est-ce que je me rends compte que ce que je critique si aisément chez un autre n’est qu’une paille par rapport à la poutre dont je n’ai pas conscience chez moi ? C’est rarement évident de seulement prendre conscience de sa manière hypocrite de voir ce qui cloche chez un autre.  

J’ai certainement à apprendre à reconnaître que mon jugement est trop souvent partial, faussé, injuste, subjectif sans que je m’en rende toujours compte. Je suis plus complaisant avec moi-même, plus aveugle quand il s’agit de voir de quoi je dois me débarrasser pour une juste vision des choses.

C’est bien une question de regard. Un regard qui est différent selon qu’on le pose sur les autres ou sur soi-même peut-être parce que l’on ne prend jamais assez de recul nécessaire pour se regarder, peut-être parce on voit plus facilement ce qui serait à réformer chez le voisin plus que chez soi, peut-être parce qu’il est difficile de poser un regard juste sur soi ?

Or, nous avons souvent tendance à vouloir corriger, améliorer, avertir, enseigner les autres. C’est un devoir que nous nous imposons, bien sûr pour leur bien, pour leur sanctification, pour leur salut. Un devoir d’oculiste moralisateur pour pratiquer l’opération nécessaire et enlever ce qui n’est qu’une paille dans leur œil.

Mais lorsque la vue du mal chez les autres éveille en nous le désir de les aider à s’en débarrasser, il ne suffit pas que ce désir soit sincère et animé de bons sentiments, il faut encore nous y prendre de la bonne manière. Celle-ci consiste d’abord à pratiquer sur soi l’opération que l’on se proposait de pratiquer sur l’autre pour le secourir.

Car il n’y a rien de plus irritant, de plus insupportable, de plus improductif que de se faire corriger par quelqu’un qui, ayant les mêmes défauts, voire de plus gros, manifestement ne se corrige pas lui-même d’abord. Or, un aveugle ne peut pas conduire un autre aveugle sans risque ! Enlève d’abord la poutre de ton œil…

On pourrait en déduire qu’en ne s’occupant pas premièrement de la paille dans l’œil de l’autre, il s’agit de faire preuve de tolérance, de complaisance voire d’indifférence à son égard, comme si ce n’était pas notre affaire. Ce n’est pas ce que Jésus enseignait par cet exemple. Il ne dit pas qu’il ne faut pas s’occuper de la paille dans l’œil d’un frère parce que ce n’est pas important ou parce que nous n’avons pas à le juger.

Mais il recommande d’abord d’enlever la poutre dans notre œil pour mieux voir comment retirer la paille qui entrave la vision de ce frère. Sans ce préalable, Jésus qualifie d’hypocrisie le désir d’ôter ce qui n’est que paille chez un autre.

Je ne suis ni crédible ni efficace pour aider l’autre à se débarrasser de son défaut si je ne vois pas ce dont je dois d’abord me débarrasser. Je ne peux pas me permettre de le corriger si je reste incapable de me corriger moi-même. Je n’ai pas le droit de lui donner une leçon de conduite si je commets les mêmes erreurs. Je ne peux pas juger ses défauts si je ne reconnais pas mes propres péchés.

Quelle poutre serait à enlever de mon œil d’abord ? Peut-être celle de mon agressivité naturelle quand je veux aider un frère à se libérer de sa colère momentanée qui n’est qu’une paille en comparaison avec ce qui m’entrave. Peut-être celle de mon inquiétude tenace quand je veux apaiser une sœur de son angoisse passagère. Peut-être celle d’une permanence de pensées négatives avant d’aider un autre à penser autrement.

 

Quelle poutre serait à enlever de mon œil d’abord ? Si nous ne voyons pas laquelle, c’est déjà une preuve qu’il y en a une fameuse ! Avoir une poutre dans l’œil, c’est admettre qu’on a plus à se reprocher, plus à changer, plus à corriger que ceux qui n’ont qu’une paille et pourtant qu’on juge plus sévèrement. Une paille n’est qu’une peccadille par rapport à une poutre.

Si on doit pouvoir ôter, avec prudence et charité, la paille dans un autre œil, par contre, il s’agit d’ôter soi-même la poutre de son œil. C’est une opération qu’il m’incombe de pratiquer moi-même. C’est un devoir que je m’impose. Je ne peux pas demander qu’on le fasse à ma place ou espérer que par miracle, la poutre soit ôtée à mon insu. C’est faire acte de repentir.

Nous retiendrons donc ce principe élémentaire enseigné par Jésus: avant de vouloir changer les autres, il faut se changer soi-même ; avant de juger les autres, il faut se juger soi-même ; avant de critiquer les autres, il faut savoir pratiquer l’autocritique ; il faut utiliser la même mesure pour soi-même que pour autrui.

L’actualité nous offre une opportunité au moins de réfléchir à ce principe voire de le mettre en application en n’hurlant pas haineusement avec les loups à l’occasion de la libération conditionnelle de Michelle Martin. Certes sa culpabilité dans l’affaire Dutroux n’est pas une paille ou une peccadille. Sa responsabilité est avérée et elle a été condamnée pour sa complicité dans le traitement atroce des victimes de son ex-mari.

Mais la poutre de la vengeance et de la haine ne doit lui refuser le droit au pardon ou d’espérer pour elle le pardon de Dieu même pour les pires d’entre nous. Et puis, hormis la légalité de sa libération qui n’est pas une faveur mais un droit légal, n’oublions pas ce que le Seigneur a déclaré : celui qui commet un meurtre mérite de passer en jugement… mais celui qui se met en colère contre son frère mérite de passer aussi en jugement…

Combien parmi ceux qui crient au scandale à cette occasion, ne seraient-ils pas passibles d’un jugement semblable selon la Parole du Seigneur ? Dans quel œil est la poutre ?

 

Que nous fassions donc toujours notre propre examen de conscience avant de porter un jugement sur un frère ou une sœur, ou n’importe qui et laissons à Dieu l’autorité de juger chacun, en n’oubliant jamais que Jésus-Christ est mort injustement pour qu’il n’y ait plus de condamnation pour ceux qui reconnaissent son sacrifice expiatoire pour eux-mêmes!

 

L. Flémal, pasteur.

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